Un axe cerveau-intestin au cœur de la recherche
Le système digestif est souvent surnommé le « deuxième cerveau » en raison de son vaste réseau neuronal et de son interaction avec le système nerveux central. Les scientifiques s’intéressent de plus en plus aux neurotransmetteurs intestinaux, qui jouent un rôle clé dans la communication entre l’intestin et le cerveau. Ces molécules chimiques influencent non seulement la digestion mais aussi des fonctions essentielles comme l’humeur, la gestion du stress et l’immunité.
De récentes recherches mettent en lumière l’importance du microbiote intestinal dans la production et la régulation des neurotransmetteurs. Cette découverte ouvre la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour traiter des troubles digestifs, neurologiques et psychiatriques.

Les principaux neurotransmetteurs intestinaux et leur rôle
1. La sérotonine : Le régulateur de l’humeur et du transit intestinal
La sérotonine est l’un des neurotransmetteurs les plus étudiés dans le cadre de l’axe intestin-cerveau. Près de 95 % de la sérotonine totale du corps est produite dans l’intestin, principalement par les cellules entérochromaffines et certaines bactéries du microbiote.
- Fonctions principales :
- Régulation du transit intestinal et de la motilité gastro-intestinale.
- Modulation de l’humeur et prévention de la dépression et de l’anxiété.
- Influence sur l’appétit et la sensation de satiété.
Des études ont montré que des déséquilibres en sérotonine intestinale peuvent être impliqués dans des troubles comme le syndrome de l’intestin irritable (SII) et la dépression.
2. La dopamine : Un lien entre plaisir, motivation et digestion
Si la dopamine est bien connue pour son rôle dans le système de récompense cérébral, elle est aussi produite dans l’intestin, où elle intervient dans des processus digestifs et immunitaires.
- Fonctions principales :
- Régulation de la motilité intestinale.
- Influence sur le stress et l’adaptation émotionnelle.
- Rôle dans l’absorption des nutriments et l’équilibre du microbiote.
Un dérèglement du système dopaminergique intestinal peut être associé à des troubles digestifs et à des pathologies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson.
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3. L’acétylcholine : Un acteur clé dans la communication intestin-cerveau
L’acétylcholine est essentielle pour la régulation du système nerveux entérique. Elle favorise la transmission des signaux entre les neurones intestinaux et régule diverses fonctions digestives.
- Fonctions principales :
- Accélération du transit intestinal.
- Stimulation des sécrétions digestives.
- Régulation de l’inflammation intestinale.
Un déficit en acétylcholine peut entraîner des troubles du transit comme la constipation chronique et des dysfonctions neurovégétatives.
4. Le GABA : L’apaisant naturel du système digestif
Le GABA (acide gamma-aminobutyrique) est un neurotransmetteur inhibiteur impliqué dans la relaxation musculaire et la réduction du stress.
- Fonctions principales :
- Diminution de l’hyperactivité nerveuse intestinale.
- Effet apaisant sur le stress et l’anxiété.
- Régulation du sommeil et de la récupération.
Certains probiotiques, comme les Lactobacillus et Bifidobacterium, sont capables de produire du GABA, renforçant ainsi le lien entre microbiote et bien-être mental.
Le rôle du microbiote intestinal dans la production des neurotransmetteurs
1. Interaction entre le microbiote et le système nerveux
Le microbiote intestinal contient des milliards de bactéries qui influencent directement la production et la régulation des neurotransmetteurs. Des études ont démontré que des déséquilibres dans la composition du microbiote peuvent altérer la signalisation neurochimique et entraîner des troubles digestifs et neurologiques.
- Exemples d’interactions :
- Certaines souches bactériennes (comme Bacteroides et Clostridium) modulent la production de sérotonine.
- Lactobacillus rhamnosus favorise la production de GABA, réduisant le stress et l’anxiété.
- Des altérations du microbiote sont associées à des maladies comme la dépression, le SII et la maladie de Parkinson.
2. Influence de l’alimentation sur la production des neurotransmetteurs
L’alimentation joue un rôle majeur dans la régulation des neurotransmetteurs intestinaux. Certains nutriments spécifiques favorisent leur production :
- Tryptophane (présent dans la banane, la dinde, les noix) → précurseur de la sérotonine.
- Tyrosine (dans les produits laitiers, les œufs, les amandes) → précurseur de la dopamine.
- Choline (œufs, foie, poisson) → essentielle pour la production d’acétylcholine.
- Fibres prébiotiques (ail, oignons, asperges) → favorisent un microbiote équilibré et donc une meilleure production de neurotransmetteurs.
Applications thérapeutiques et perspectives futures
1. Probiotiques et psychobiotiques
Les psychobiotiques sont des probiotiques ayant un impact direct sur la production de neurotransmetteurs et l’axe intestin-cerveau. Ils sont testés dans le traitement :
- De la dépression et de l’anxiété.
- Du syndrome de l’intestin irritable.
- Des troubles neurodégénératifs.
2. Médicaments ciblant les neurotransmetteurs intestinaux
Des molécules thérapeutiques sont en cours de développement pour agir spécifiquement sur les neurotransmetteurs intestinaux, notamment :
- Agonistes de la sérotonine pour réguler le transit et l’humeur.
- Modulateurs du GABA pour réduire l’hypersensibilité intestinale.
- Inhibiteurs des bactéries pathogènes affectant le métabolisme des neurotransmetteurs.
Vers une meilleure compréhension du lien intestin-cerveau
Les recherches sur les neurotransmetteurs intestinaux ouvrent des perspectives passionnantes pour la prise en charge des troubles digestifs et neurologiques. Comprendre comment ces molécules influencent à la fois la digestion et le bien-être mental permet d’envisager des thérapies innovantes basées sur la modulation du microbiote et l’optimisation des neurotransmetteurs.
Dans un futur proche, les approches combinant probiotiques, alimentation adaptée et pharmacologie ciblée pourraient révolutionner la prise en charge de maladies chroniques allant du syndrome de l’intestin irritable aux pathologies neurodégénératives.